• « Schweig, und tanze ! » : énigmes et contradictions dans la scène finale d’ Elektra de Strauss, par Grégoire Tosser et Inès Taillandier Guittard

    « Schweig, und tanze ! » : énigmes et contradictions  dans la scène finale d’ Elektra de Strauss
    par Grégoire Tosser et Inès Taillandier-Guittard

    Dans l’entretien réalisé par Alain Perroux en marge du festival d’Aix-en-Provence le 29 juin 2013, Patrice Chéreau évoque sa perplexité face à certains moments de l’opéra de Strauss Elektra, représenté quelques semaines plus tard. C’est cette incompréhension avouée face à ce que Chéreau appelle une « ivresse sonore », qui sera l’objet de cette communication. Plus précisément, il s’agira de rendre compte à la fois de la nature problématique des enjeux musicaux et dramatiques de la dernière scène d’Elektra, et des solutions scéniques proposées par Chéreau. Pour ce faire, nous évaluerons, via l’analyse musicale, les partis pris de Strauss quant à la mise en musique du livret de Hofmannsthal. Ainsi, le phénomène de transe ménadique que les didascalies suggèrent rentre en contradiction avec les thèmes musicaux choisis par Strauss : si Hofmannsthal précise que la danse d’Elektra est « indéfinissable » (namenlos), le compositeur use de rythmes clairement identifiables (celui de la valse, qui se transforme peu à peu en une sicilienne). Outre ces contradictions musico-littéraires, il existe également des ambivalences proprement musicales, qui procèdent du langage de Strauss. Enfin, il faut mentionner l’ultime ambiguïté du livret : la mort supposée d’Elektra, que rendent évidente d’autres mises en scène, notamment celle de Götz Friedrich en 1981, à laquelle Chéreau fait implicitement référence dans l’entretien mentionné plus haut.

    L’ensemble des ces contradictions et équivocités constituent autant d’énigmes pour Chéreau. Sa mise en scène, au lieu de les ignorer ou de les éluder, les met au jour, voire les exacerbe ; elle nous invite dès lors à réévaluer et à repenser la manière dont nous percevons et comprenons l’opéra, dans sa complexité et sa profondeur sémantique.

    “Schweig und tanze!”: enigmas and contradictions in the final scene of Richard Strauss’s Elektra

    Interviewed by Alain Perroux during the Aix-en-Provence festival on June 29, 2013, Patrice Chéreau talks about his perplexity with regard to certain scenes of Strauss’s opera Elektra, represented a few weeks later. It is this admitted misunderstanding in view of this “acoustic intoxication” (Chéreau’s words), which will be the subject of this communication. More precisely, our paper aims to give an account both on the problematic nature of musical and dramatic issues of the last scene of Elektra, and on scenic solutions proposed by Chéreau. In order to achieve this, we will evaluate, through musical analysis, Strauss’s bias on the musical setting of Hofmannsthal’s libretto. For example, the phenomenon of menadic trance, that is suggested by the stage directions, contradicts the musical themes chosen by Strauss: if Hofmannsthal said that Elektra’s dance is “indefinable” (litteraly “without name” – namenlos), the composer uses clearly identifiable rhythms (one of the waltz, which gradually turns into a siciliana). Besides these musical literary contradictions, there are also specifically musical ambivalences, which stem from Strauss’s language. Finally, we must mention the ultimate ambiguity of the libretto: the supposed death of Elektra, that other stagings make obvious, including that of Götz Friedrich in 1981, to which Chéreau implicitly refers in the aforementioned interview.

    All these contradictions and equivocities are many puzzles to Chéreau. His staging, rather than ignoring or evading them, reveals or exacerbates them; therefore it invites us to reassess and rethink our perception and understanding of the opera, in its complexity and semantic depth.


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