• Les princes et les dieux, l’incarnation du pouvoir, du Ring à La Reine Margot, par Françoise Zamour

    Les princes et les dieux, l’incarnation du pouvoir, du Ring à La Reine Margot
    par Françoise Zamour

    Dans l’œuvre de Patrice Chéreau, la scène et l’écran sont peuplés de princes, de rois et de reines, tour à tour triomphants et déchus, célébrés ou craints par une armée de courtisans, puis abandonnés à la solitude. L’homme, ou la femme, de pouvoir fait l’objet, de la part du metteur en scène, qui n’a d’ailleurs pas hésité à interpréter lui-même Bonaparte, Richard II, ou, de manière plus confidentielle, Lénine, d’une attention d’entomologiste. Les héros de Chéreau se confrontent au pouvoir, et se cognent à l’histoire.

    Plus que tout autres, ces personnages incarnent de manière vibrante le déchirement propre à l’imaginaire de Chéreau. Entre l’intime et le politique, leur corps offert au public fonctionne comme le champ d’un affrontement où résonnent également les échos du monde contemporain. Wotan, autant que Margot, sont comme traversés par les bouleversements du XXe siècle. Nourrie par la fréquentation des textes de Brecht, de Thomas Mann, mais également de Glucksman ou de Kantorowicz, la réflexion de Chéreau sur la guerre, la violence de l’histoire, le totalitarisme, trouve à s’incarner dans ces personnages surgis du passé ou de la légende.

    Toutefois, cette insatiable curiosité à l’égard des puissants, si elle induit une réflexion sur le politique, et sa figuration, interroge également sur la représentation. Interprètes de leurs propres personnages publics, les princes de Chéreau renouvellent sans cesse le questionnement passionné de l’artiste sur le mystère de l’acteur.

    Of Gods an Kings, figuration of power from The Ring to La Reine Margot

    Wotan, Margot, Clytemnestra, King Richard II, King Henry IV, Bonaparte: so many kings and queens, princes and gods have occupied the stage in Chereau’s productions. All these characters, whose intimacy is as violently exposed as it is strictly hidden, tortured and silenced, are perpetually dealing with history and power. The purpose of this presentation is to explore the diversity and richness of the representation of power in Chereau’s imagery. Examining the figuration of power in Chereau’s films and theatre productions, one notices how, through these past heroes, the director questions our present. Nourished by Glucksman, Kantorowicz, or Thomas Mann, Chereau’s reflections on contemporary political issues shed light on his conception of historical or legendary kings. Spectators perceive echoes of twentieth century upheavals, wars and totalitarianism in The Ring, but also in the historical drama La Reine Margot. What is characteristic of Chereau’s manner here is the focus: historical issues are literally incarnated.

    More than any other characters, kings and queens are actors, always playing this role in the presence of ordinary humans. Looking at kings, Chereau scrutinizes them as a very special kind of performer. Throughout his work, from Brechtian inspiration to his fascination with film, one could consider this way of questioning the incarnation of power as a constant of Chereau’s topics: an endless interrogation about the mystery of the actor.


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